J'ai oublié...

Guérir n’est rien d’autre qu’ oublier ses fêlures,
Devenir un autre,dans l’espace, sous l’azur.
Négliger les pleurs dégoulinant sur la peau,
Etouffer ce coeur gonflé de tant de sanglots.
S’oublier un peu, se croire aguerri, du sang et du feu
Qui rudoie l’esprit, des frayeurs ineffables qui étreignent la chair
Et des champs misérables où résonnent les guerres,
Où les enfants agenouillés implorent un Dieu indifférent,
Les yeux de larmes maculées et les habits rouges de sang,
Où sourdement l’aïeul pleure ce souffle qui s’étiole,
Attendant résigné l’ heure de l’étrange farandole.
Guérir n’est rien d’autre qu’ oublier suffisamment,
Ma douleur, la vôtre, celle qui sourd secrètement,
Celle qui chuchote confusément à nos rêves inavoués,
Qu’inestimable est le présent dans la douleur enfantée.
J’ai oublié mon coeur qui chancelle et qui geint,
Et tous les autres cœurs à qui je tiens la main.

Sol invictus.